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L'Instant Juridique du 08/10/2024
Joe Biden a appelé à voir grand lors de son premier discours devant les parlementaires. Mais ses plans d’investissement colossaux doivent encore surmonter l’obstacle d’un Congrès profondément divisé, qui met à dure épreuve ses talents auto-proclamés de négociateur. « L’Amérique va de nouveau de l’avant. Et nous ne pouvons pas nous arrêter là! », a lancé le 46e président des Etats-Unis devant les élus réunis sur la colline du Capitole mercredi soir. « Les investissements dans les emplois et les infrastructures comme ceux que nous envisageons ont souvent bénéficié du soutien » des deux partis, républicain et démocrate, a-t-il affirmé. « Alors, mettons-nous au travail ».
Tandis qu’il franchit jeudi le cap symbolique de ses 100 jours au pouvoir, sa vision d’une large coopération entre partis semble toutefois loin, très loin, de la réalité. S’il a réussi à faire adopter rapidement, en mars, un vaste plan de soutien à l’économie américaine, frappée par la pandémie, ses deux autres projets titanesques d’investissements — « pour les emplois » et « pour les familles américaines »– de plusieurs milliers de milliards de dollars au total, ne sont encore pas près d’être adoptés au Congrès. Joe Biden peut certes compter sur des majorités à la Chambre des représentants et au Sénat. Mais elles sont si étroites, surtout à la chambre haute, qu’il ne peut se permettre quasiment aucune défection. Pour ces deux plans, les démocrates pourraient s’appuyer sur une règle qui leur permet de contourner, exceptionnellement, un obstacle de poids au Sénat: l’obligation de trouver 60 voix, sur 100, pour autoriser un vote final.
Avec 50 sénateurs tout juste, les démocrates n’auraient alors plus besoin que d’une majorité simple. Or la vice-présidente Kamala Harris dispose d’une voix pour départager le vote en leur faveur (51-50). Même dans ce scénario, le président « ne dispose tout simplement d’aucune marge d’erreur », souligne Kyle Kondik, expert en sciences politiques de l’université de Virginie. « A moins que Biden puisse d’une façon ou d’une autre rallier des soutiens républicains. Mais cela impliquerait qu’il accepte » des mesures bien moins ambitieuses que celles qu’il a présentées. Or un tel ajustement risquerait, en retour, de lui faire perdre les votes de démocrates, depuis les progressistes comme Bernie Sanders et Alexandria Ocasio-Cortez jusqu’aux sénateurs centristes Joe Manchin et Kyrsten Sinema. « Les partis ne sont tout simplement pas en phase sur ces propositions », conclut Kyle Kondik. – « Sandernistas » – Chez les républicains, la grogne monte face à un président qui, selon eux, a oublié ses origines modérées pour se ranger derrière les « radicaux » à gauche. « Il faut qu’il arrête d’écouter les +Sandernistas+ », a déclaré à l’AFP le sénateur républicain Chuck Grassley, en jouant sur le nom de Bernie Sanders. « Il faut qu’il devienne un président Biden sur le modèle du sénateur Biden » qu’il fut pendant plus de 35 ans, a poursuivi le conservateur, en soulignant qu’à l’époque, il pouvait travailler de concert avec lui. « Les Américains ont élu un Sénat à 50-50, une courte majorité à la Chambre, et un président qui prêchait la modération () Mais les 100 premiers jours laissent beaucoup à désirer », avait dénoncé mercredi le chef des sénateurs républicains Mitch McConnell, avant le discours de Joe Biden qu’il n’a que très peu applaudi. « Il n’est toutefois pas trop tard », avait ajouté le républicain. Les démocrates peuvent encore s’engager « à encourager le consensus au lieu d’approfondir nos divisions ».
Pour Jenna Bednar, professeure de sciences politiques à l’université du Michigan Joe Biden doit surtout convaincre ses opposants, et les démocrates centristes qui pourraient hésiter à adopter ses plans colossaux, que « ses projets sont très populaires avec leurs électeurs ».
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